Véronique Bourez : responsabiliser les individus

Véronique Bourez (D.R.)

[EXTRAIT] Vice-présidente Europe & Eurasie de Coca-Cola, Véronique Bourez évoque pour la Revue Civique, les fruits de son expérience, les nouvelles méthodes de management, qui consistent autant à consulter et à entraîner les équipes, qu’à décider de manière directive. « Les nouveaux outils de communication et les nouvelles technologies sont en train de révolutionner, ou en tout cas de faire évoluer très fortement, les pratiques de management » nous explique l’une des rares femmes dirigeantes de grande entreprise. « Cette nouvelle manière de travailler, plus flexible et à distance, implique une évolution vers un mode de management par objectifs. En France, nous sommes encore dans le management par ‘présentéisme’, contrairement aux pays anglo-saxons ou nordiques, plus avancés que nous sur ce point.»

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La REVUE CIVIQUE : Dans votre grande expérience de l’entreprise, qu’entendez-vous par « communityship » ?
Véronique BOUREZ : J’ai la conviction que les nouveaux outils de communication et les nouvelles technologies sont en train de révolutionner, ou en tout cas de faire évoluer très fortement, les pratiques de management. La raison est simple : désormais, nous avons des moyens de connexion infinis. L’avenir est à un mode de travail de plus en plus flexible, alliant des moments en présence réelle, en interaction directe entre les membres d’une équipe et des modes d’interactions virtuelles de plus en plus nombreux. Ce changement a un impact direct sur notre façon de travailler : nous devons apprendre à être plus dans l’échange, et un échange qui ne sera pas forcément visuel ou en direct.

Nous observons
une forte demande de participation

Nous serons de moins en moins dans un mode de leadership « top-down », notamment parce qu’il ne correspond pas aux pratiques des nouvelles générations et que nous observons aujourd’hui une forte demande de participation. Les choses vont très vite, il faut s’adapter et prendre les décisions très vite. Pour cela, il est indispensable que les individus au sein des équipes soient responsabilisés, c’est aussi cela la notion de « communityship ». Cependant s’il faut savoir écouter, décider reste le rôle du leader : je ne crois pas à un mode de décision communautaire ou consensuel. Le « communityship » est la capacité à avoir, grâce aux outils des nouvelles technologies, le plus d’entrées possibles, de connexions et de compréhension en ce qui concerne, en particulier, les consommateurs et le marché, afin de pouvoir décider au mieux. Le leader doit donc être en même temps « entraîneur » et décideur… Oui, je pense que le leader doit encourager l’écoute, interne ou externe, autour d’une problématique. Nous sommes aujourd’hui plus intelligents pour prendre des décisions, car nous avons plus d’informations et plus de capacité à capter et à anticiper les réactions.

N’y-a-t-il pas un risque de se noyer dans les informations mises à disposition ?
Je ne crois pas. Écouter ne veut pas dire se noyer dans les informations mais être capable de mieux anticiper, de mieux comprendre les enjeux lorsque nous avons à prendre une décision.

Sortir du « présentéisme »

Mais comment être dans un leadership d’entraînement et non seulement de commandement ou de leadership « top down » ?
Cela passe tout d’abord par les structures : si vous avez une structure extrêmement pyramidale, elle va amplifier le commandement « top-down ». Il faut aller vers des organisations plus « lean », plus plates ou horizontales. En responsabilisant et en limitant les échelons hiérarchiques, nous allons vers plus de « communityship » et quittons le mode de management « top-down ». La décision appartient de toute façon toujours au dirigeant. Seule la manière dont la décision est nourrie doit changer. Outre la structure, cela passe par quels autres types d’action pour un manager ? Cette nouvelle manière de travailler, plus flexible et à distance, implique une évolution vers un mode de management par objectifs. En France, nous sommes encore dans le management par « présentéisme », contrairement aux pays anglo-saxons ou nordiques, plus avancés que nous sur ce point.

Y aurait-il un « choc » culturel entre les modes managériaux anglo-saxons et français ?

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Propos recueillis par Marie-Cécile QUENTIN et Emilie GOUGACHE
(in La Revue Civique n°14, Automne 2014)