Trop d’interdits et de normes, pour une large majorité de Français

73% des Français jugent que les interdits sont devenus trop nombreux : c’est l’un des chiffres clés du sondage Viavoice, réalisé en partenariat avec la Revue Civique, L’Express et Radio Classique.

Ces interdits et contraintes sont jugés si importants qu’ils peuvent conduire à des comportements répréhensibles, à l’opposé des objectifs affichés par les lois ou normes en tous genres qui prescrivent ces interdits. Ainsi 85% des personnes interrogées considèrent que la perte des libertés individuelles peut conduire beaucoup de citoyens à faire des travaux au noir. 81% considèrent que cette perte de liberté pousse les  gens à acheter des cigarettes non déclarées (contrebandes, ventes en circuits parallèles) et 55%  pensent même que cet excès de privation peut pousser à adopter des comportements dangereux (drogue, alcool…).

Les objectifs d’intérêt général de toute une série d’interdictions ou restrictions, objectifs en matière de sécurité (routière, alimentaires) ou de santé publique (alcoolisme, tabagisme, …) par exemple, seraient donc pour partie desservis par le cumul de restrictions. Comme « trop d’impôts tue l’impôt » (courbe de Laffer, qui montre que la rentabilité financière des prélèvements décroît avec leur augmentation), peut-on dire, au vue de cette étude, que « trop de normes tue la norme ? » La question a été posée, lors d’un débat que la Revue Civique et Viavoice ont organisé, avec deux essayistes et intellectuels, Nicolas Tenzer, Président d’Aspen-France, et Gaspard Koenig, Président du think tank, « Génération Libre ».

Dans une société française attachée aux libertés individuelles (93% des français y sont attachés, 53% très attachés),  78% des personnes interrogées indiquent en tous cas vouloir retrouver une part de liberté perdue.

Pour François MIQUET-MARTY, Président de Viavoice, « aux yeux des Français aujourd’hui, les mesures et incitations prises, soient-elles légitimes, atteignent un stade tel qu’elles portent une atteinte excessive aux libertés individuelles. Ce sentiment paraît être l’aboutissement d’une histoire, la conséquence du cumul de mesures adoptées souvent depuis quarante ans. Cet enjeu est d’autant plus brûlant que les mesures, notamment en matière de consommation, risquent de se développer encore à l’avenir. Pour la plupart des personnes interrogées, ce dilemme connaît une solution qui a un nom : la prévention plutôt que la répression.»  explique François MIQUET-MARTY, Président de Viavoice

« On voit bien qu’un effet de saturation risque d’être  atteint quant au nombre et au niveau de normes, d’interdictions ou prescriptions en tous genres. Le risque est à la fois celui du contournement de ces normes et celui d’une déresponsabilisation du citoyen. Les plus jeunes risquent de verser dans des comportements transgressifs vis-à-vis de normes apparemment imposées : on aboutit aucontraire de l’objectif visé (par exemple en matière de santé publique) » commente Jean-Philippe MOINET, auteur, fondateur de la Revue Civique.

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On pourrait penser qu’en France, les libertés individuelles seraient perçues en progression continue, promues par les principes démocratiques et républicains, par l’économie de marché et une société ouverte. Pourtant, ces dernières années, les libertés individuelles paraissent mises à mal, du point de vue de l’opinion publique, par l’avènement de multiples normes, règles, interdits et injonctions : limitation de vitesse, interdiction de fumer dans les lieux publics, surveillance sur Internet, standardisation des bouteilles d’alcool, paquet de cigarettes neutre, interdiction du kit « mains libres » au volant,  campagnes pour manger moins gras, moins sucré et moins salé  etc…. et bien d’autres.

La forte tentation de la transgression des règles, qui apparaît dans cette étude, fait craindre l’émergence d’une «contre-société».

Les « trois France »

Le risque, mesuré par l’étude aussi, est bien que les citoyens se sentent majoritairement déresponsabilisés, et même « infantilisés ». C’est sans doute pourquoi, 68 % des Français plaident pour des mesures de « prévention », permettant de faire évoluer les comportements nuisibles (par exemple à la santé ou la sécurité), plutôt que pour des mesures de « répression .

Sur cet enjeu des libertés individuelles, il serait erroné de considérer « les Français » de manière homogène. Au terme d’une typologie établie de manière statistique, trois groupes se distinguent :

–             Les « contraints critiques » (51 %) : pour cette majorité de Français,  les « interdits, contraintes et surveillances » sont de plus en plus présents et apparaissent comme des atteintes importantes aux libertés.

–             Les « contraints bienveillants » (23 %) : ils estiment également que les « contraintes, interdits et surveillances » sont « trop nombreux » mais ils font preuve de tolérance vis à vis de ces dispositifs.

–             Les « légitimistes » (26 %) : ils ne perçoivent pas de restrictions en matière de libertés individuelles et estiment que les « interdits, contraintes et surveillances » ne sont « ni trop, ni pas assez nombreux »

 ► L’étude Viavoice complète

Le reportage au JT de TF1 

L'émission, avec François Miquet-Marty et Nicolas Tenzer, qui commentent l'étude d'opinion "les libertés individuelles et les Français"

L’émission d’Europe 1 avec François Miquet-Marty, Président de Viavoice, et l’essayiste Nicolas Tenzer, qui commentent l’étude d’opinion réalisée en partenariat avec la Revue Civique, L’Express et Radio Classique

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Etude Viavoice réalisée auprès d’un échantillon de 2 002 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. Interviews effectuées en ligne du 28 mai au 2 juin 2015. Représentativité par la méthode des quotas appliquée aux critères suivants : sexe, âge, profession de la personne de référence au sein du foyer, région et catégorie d’agglomération.

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Le débat Revue Civique-Viavoice autour de l'étude "les libertés individuelles et les Français", avec les essayistes et intellectuels Nicolas Tenzer et Gaspard Koenig.