La France se veut « pionnière » de l’agro-écologie

Le Ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll serrant la main de José Graziano da Silva, directeur général de la FAO lors de la rencontre du 19 septembre 2014 à Rome (© Xavier Remongin / Min.agri.fr)

Plus d’un avant qu’un sommet mondial réunisse les chefs d’État et de gouvernement à Paris, le Ministre français de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt, Stéphane Le Foll (qui porte aussi la casquette de porte-parole du Gouvernement) pousse les feux de l’agro-écologie » sur la scène internationale et remettait (ce 22.09.14) un rapport chiffré sur les contributions de l’agriculture et des forêts françaises à la lutte contre le réchauffement climatique.

« Comme toute activité économique et humaine, a souligné Stéphane Le Foll, l’agriculture a une responsabilité particulière dans la réduction des gaz à effets de serre, mais elle est aussi « une solution dans cette réduction ». En présentant les éléments du rapport qu’il avait commandé, le Ministre a tenu à préciser que réduction des effets indésirables sur le climat ne devait absolument pas rimer avec réduction de la production agricole elle-même, dont la France, l’Europe et la planète ont besoin pour faire face au défi de l’alimentation mondiale. Selon lui, et c’est le sens de la stratégie nationale et internationale qu’il a définie en faveur de « l’agro-écologie », il doit y avoir une combinaison vertueuse entre capacité économique de l’agriculture et capacité environnementale ou sociale, l’un des volets ne pouvant « tenir durablement » sans l’autre.

La performance des « bioproduits »

Selon Marie-Laurence Madignier, co-auteur du rapport, qui émane du Conseil général de l’alimentation de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), un organe de consultation rattaché au Ministère de l’Agriculture, l’agriculture française produirait chaque année une émission de 100 millions de tonnes équivalent CO2 et la seule substitution de produits et d’énergies non renouvelables par des « bioproduits » (comme les bio énergies, les bio matériaux…) pourrait permettre d’économiser 80 millions de tonnes de CO2.

Cette experte énonce par ailleurs plusieurs leviers d’actions pour les politiques publiques : « l’évolution des pratiques agricoles » qui concerne, par exemple pour l’élevage, la couverture des fosses, les torchères, la méthanisation ou l’alimentation des animaux d’élevage ; « une gestion plus dynamique de la sylviculture (culture des arbres) et de l’exploitation forestière », le reboisement de 50 000 hectares de terres par an étant désigné comme un objectif réaliste, permettant d’augmenter sensiblement la capacité de stockage du CO2, qui se voit naturellement capté et retenu par les arbres au lieu d’être libéré dans l’atmosphère ; « la lutte contre le gaspillage et les pertes alimentaires », considérables à l’échelle d’un pays développé comme la France, conduit pour sa part à cette estimation: 20% de réduction des gaspillages et pertes alimentaires éviteraient l’émission de 10 millions de tonnes de CO2 par an.

Toute une série de mesures aboutissent in fine au concept d’ « agriculture climato-intelligente » (« climate smart agriculture » pour les anglo-saxons), capable de concilier les adaptations nécessitées par le réchauffement climatique, le maintien d’une production agricole intensive et les impératifs de sécurité alimentaire ou sanitaire.

Le symposium sur l’intérêt de l’agro-écologie

Le Ministre Stéphane Le Foll était d’ailleurs à Rome, le 19 septembre dernier, pour représenter la France à un symposium international organisé par la FAO (organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture) sur les pratiques (et l’intérêt) de « l’agro-écologie », définie comme un axe stratégique de son ministère. Beaucoup de pays, au niveau des gouvernements, sont encore à convaincre, notamment quand il s’agit des pays occidentaux. Mais ce défi ne fait pas peur au Ministre français, persuadé d’être en avance sur un mouvement mondial qui commence à comprendre qu’il faut mieux concilier les productions agricoles intensives et la protection de l’Environnement. Au symposium de Rome, Stéphane Le Foll a veillé à entraîner et a tenu à marteler un propos « productiviste », de nature à rassurer les représentants des États européens ou nord-américains qui craignent que l’agro-écologie ne soit qu’une utopie, ou un cheval de Troie des thèses « décroissantes » ou « altermondialistes ».

« La France est pionnière en ce domaine de l’agroécologie », elle tient à combiner, a-t-il insisté, les nécessités du développement économique (et de l’emploi), les nécessités de l’alimentation mondiale tout en favorisant les pratiques, et les recherches scientifiques, qui permettent d’utiliser la nature dans un cercle vertueux de protection. Le Ministre français, qui était entouré de Ministres africains et de représentants de pays d’Amérique du Sud comme le Brésil, s’est aussi réjoui à haute voix de l’appel lancé à Rome par prés de 200 chercheurs du monde entier – dont beaucoup d’américains et de canadiens – un appel pour le renforcement des politiques publiques « agro-écologiques ». Stéphane Le Foll prévoit un tour des cinq régions-continents, destiné à porter la bonne parole sur les vertus économiques de cette agro-écologie.

JPM 

► Le premier symposium international sur l’agro-écologie
► Le lien avec ce symposium de la FAO