Sortie du livre, « Pierre Mendès France, la foi démocratique » (éd Bouquins, essai) de Frédéric Potier, jeune haut fonctionnaire, expert associé de la Fondation Jean Jaurès (sur les radicalités), après avoir été plusieurs années Délégué interministériel à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et l’homophobie; Dilcrah). Dans cet ouvrage éclairant, Frédéric Potier précise l’héritage de Pierre Mendès France, grande figure morale et politique, en ce qui concerne la question démocratique, redevenue de grande actualité en France et en Europe. Il répond ici (vidéo ci-dessous) aux questions de La Revue Civique.
« Une conception exigeante et moderne de la démocratie »
La démocratie ne se réduit pas à la bonne organisation des élections, qui n’en est qu’un élément constitutif, elle comprend aussi « quelque chose qui doit engager le citoyen et doit engager les dirigeants », explique l’essayiste Frédéric Potier, l’un des enjeux de cette haute idée de la démocratie étant aussi de « ne pas céder aux démagogies, ne pas céder aux populismes », précise-t-il. En cela aussi, la conception mendésiste de la démocratie est d’une grande modernité. Une série de principes et de valeurs sont présentés dans cet ouvrage, qui offre une radioscopie et l’exégèse des textes et pensées de Pierre Mendès France sur cette question démocratique, qui l’a opposé aux partisans gaullistes de la Vème République, jugée beaucoup trop « césariste » par le célèbre Président du Conseil de la IVème République, mais opposé aussi à une partie de la gauche radicale son époque, qui pouvait cultiver (au PCF par exemple) une approche autoritaire et centralisée de la politique, ou encore se couler parfaitement (avec François Mitterrand) dans le moule des institutions de « Monarchie républicaine » de la Vème République.
Pierre Mendès France, rappelle encore Frédéric Potier dans ce livre (et cette vidéo), soulignait l’importance des contre-pouvoirs, permettant de contrebalancer les pouvoirs de l’exécutif. « PMF » tenait à évoquer et à promouvoir l’importance des autres pouvoirs, du Parlement et des collectivités locales notamment, et à encourager des formes innovantes de démocratie active au sein de la société civile elle-même, qu’il s’agisse du rôle des syndicats ou du dialogue dans les entreprises. En matière économique et sociale, estime encore Frédéric Potier, Pierre Mendès France était un « visionnaire » dans la mesure où, en « économiste égaré en politique », il imaginait une forme démocratique de « la planification », opposée aux formes étatistes et autoritaires mises en oeuvre par exemple en URSS et en Europe de l’Est du temps des dictatures communistes. Il prônait une forme de planification économique et sociale qui est, aujourd’hui, remise à jour, par exemple par l’actuel « Commissariat général au Plan ». Bien sûr, la mondialisation des échanges n’avait pas l’intensité d’aujourd’hui. Il n’empêche, Pierre Mendès France avait bien vu, et c’est sa part de modernité, l’importance pour les Etats souverains de mieux maîtriser les grands axes de politiques publiques, pour le développement et le progrès, économique et social, des sociétés démocratiques.
JPM (30/09/21)