7 et 9 janvier 2015, attaque terroriste à Paris. Choc traumatique. 11 janvier, manifestation historique, émotion vive, colère sourde, unité nationale. Sursaut républicain : de courte, longue ou moyenne portée ? Les valeurs de la République, bien au-delà de la gauche et de la droite, semblent bien plus fortes que tous les assauts extrémistes, politiques, religieux, alliés objectifs de toutes les intolérances ?
19 mars 2012, le djihadiste Merah assassine trois soldats et quatre juifs, dont trois enfants, dans une école toulousaine. Pas de foule dans la rue. On se demande pourquoi. Pas de levée de masses citoyennes. Certains croyaient vraiment ce loup « solitaire » ?
11 septembre 2001, le choc était déjà mondial, beaucoup de Français l’avaient oublié. Attention aux risques d’amnésie collective. Les djihadistes avaient alors réussi leur sale coup: prés de 3000 victimes, deux tours jumelles abattues, force de l’image. L’Amérique frappée au cœur, à New York. Acte de guerre (mondiale).
9 septembre 2001, deux jours avant ce choc télévisuel planétaire, un commandant charismatique, que j’avais pu rencontrer quelques mois plus tôt à Paris (au titre de mes fonctions à LCP), est victime d’un attentat commis par les talibans en Afghanistan : le Commandant Massoud, fervent musulman, victime de la furie des islamistes radicaux. Oublié, il devrait avoir une place en un Panthéon mondial. Et pourquoi pas dans notre Panthéon national ! Peut-être l’actuel Président de la République se prononcera. Mon adresse au précédent était resté sans réponse.
24 septembre 2014, le Français Hervé Gourdel, sympathique guide de montagne, s’est aventuré dans des cols infréquentables, en Algérie, ce pays qu’il aimait tant. Il est exécuté froidement, sauvagement, par les mêmes idéologues assoiffé de sang. Et de spectacle aussi.
Une riposte civiquement sans frontières
16 décembre 2014, plus de 130 enfants sont tués dans un attentat djihadiste, qui a pris, au Pakistan, une école pour cible. L’un des talibans a crié: « Il y a un tas d’enfants cachés sous les bancs. Allez les chercher pour les exécuter ! » Une seule « brève », 1 minute peut-être, dans nos journaux télévisés à l’approche des fêtes…
Les dates sont si nombreuses… elles se fondent dans une histoire, déjà longue. Le 11 septembre avait été la suite de ce qui s’était passé tragiquement à Tel Aviv, Kaboul, Buenos Aires, Alger ou Paris, à la station RER Saint-Michel notamment : en 1995-1996, 16 morts, 300 blessés.
Les soldats français sont nombreux à être tombés, en toute discrétion parfois, au champ d’honneur de cette bataille, menée en coalition contre le menaçant « Etat Islamique » au Proche Orient, bataille menée à juste titre tous les jours contre la furie criminelle. Au Mali par exemple, avec 3000 soldats français au sol en opérations Barkhane brillamment menées. En Irak, et désormais en Syrie, avec notre aviation de « reconnaissance », qui prépare des frappes là où Daesh avance, enrôle et massacre, en toute impunité.
Un souvenir durable est du aux dizaines de milliers de musulmans, femmes en particulier, soumis aux pires violences djihadistes, au mot d’ordre totalitaire: soumission. S’ils viennent se réfugier en Europe, comment oser leur dire qu’il faudrait faire le tri, entre bons et mauvais réfugiés, entre réfugiés « de guerre » et réfugiés « des persécutions » ?! Ne serait-ce pas une honte pour la République, et l’Europe toute entière, comme l’avait rappelé Angela Merkel, avant le sursaut heureusement provoqué par la photo choc de l’enfant kurde retrouvé mort sur une plage ?
2 novembre 2004 : « soumission » était d’ailleurs le titre du film qui mettait en images cette violence djihadiste insupportable. Images, comme les dessins de Charlie, de simples images et dessins, qualifiés d’insupportables par les tueurs à la fatwa (et kalachnikov) rapide ! Théo Van Gogh, était ce jour là assassiné en pleine rue, à Amsterdam.
La guerre portée sur notre territoire est, on le voit depuis de longues années, sans frontières. C’est assez simple : nos ripostes, et notre mémoire collective, doivent l’être aussi. Civiquement sans frontières.
Jean-Philippe MOINET,
qui a présidé l’Observatoire de l’extrémisme,
est fondateur de la Revue Civique (jpmoinet@revuecivique.eu)
Chargé d’enseignements en Master,
il est directeur conseil à l’institut Viavoice.
(janvier 2015)