Les menaces ont fortement augmenté sur la France, comme sur tous les alliés de la coalition internationale qui se mobilise en Irak contre l’État Islamique (EI). Le leader de ce mouvement qui prétend instaurer un « califat » et un État terroriste au Proche-Orient (en faisant au passage exploser les frontières actuelles de l’Irak et de la Syrie), s’en est pris directement aux citoyens français, en des termes d’une sauvagerie moyenâgeuse.
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« Si vous ne pouvez pas trouver d’engin explosif ou de munition, a lancé Abou Mohammed Al-Adnani, porte-parole d’EI, alors isolez l’Américain infidèle, le Français infidèle, ou n’importe lequel de ses alliés. Écrasez-lui la tête à coups de pierre, tuez-le avec un couteau, renversez-le avec votre voiture, jetez-le dans le vide, étouffez-le ou empoissonnez-le », a précisé ce chef djihadiste à ses troupes, réelles et potentielles, dont on sait qu’elles sont garnies d’esprits faibles qui, venus de France ou en France, sont parfois prêts à verser dans une violence aveugle.
Les menaces et cette consigne sont prises très au sérieux, en France et dans les démocraties occidentales. «De fait, écrivent Thibault de Montbrial et Patrice Ribeiro, respectivement avocat à la Cour et Secrétaire général du syndicat Synergie-officiers dans une tribune du Figaro (23.09.14), la circulation libre sur les réseaux sociaux de vidéos vantant des crimes de masse, génocides, tortures et décapitations, sert d’appel pour des milliers de candidats en mal de repères. C’est la première fois dans l’Histoire que des abominations mises en scène sans vergogne attirent des jeunes élevées dans des sociétés civilisées et policées, en rupture totale avec les valeurs humaines universelles élémentaires, dont ils ont pourtant été pétris.»
« Tout est désormais possible »
Et de poursuivre : «Les impétrants en reviennent (de Syrie ou d’Irak) déterminés à importer le djihad dans leur patrie, renforcés dans leurs pulsions criminelles ou traumatisés. Les dernières barrières morales, qui constituent le seuil d’équilibre intérieur de chacun, ont été abolies chez eux».
L’alerte est donnée sur notre propre territoire. «Outre la menace extérieure (GIA, Aqmi), les services de sécurité français, écrivent encore Montbrial et Ribeiro, doivent désormais s’adapter à cette menace intérieure massive et hétéroclite, comme en témoignent les profils variés des djihadistes identifiés : milieux bourgeois ou non, jeunes issus de l’immigration ou pas, convertis de la dernière minute (…) il se déduit de l’ensemble de ces éléments qu’un passage à l’acte en France, d’initiative ou sur instruction extérieure, est désormais plausible (…) Le spectre de modus operandi observé depuis quelques années permet d’envisager tous les scénarios. De l’attentat à l’arme blanche (décapitation en pleine rue à Londres en mai 2014) en passant par les assassinats ciblés de Merah et Nemmouche, jusqu’à l’attaque dans un lieu public avec des explosifs militaires ou des armes à grande capacité de feu (comme à Bombay en 2008), tout est désormais possible».
Les probabilités d’attaques djihadistes montent donc, actuellement, à l’évidence. Les services de sécurité occidentaux ont rehaussé les mesures de vigilance depuis les décisions d’intervenir militairement en Irak et depuis le sommet de Paris, qui a politiquement entériné ces décisions stratégiques. Il était en effet impossible pour les pays concernés, y compris voir surtout pour les pays arabes environnants, de laisser le djihadisme tonitruant installer un État dans leur zone géographique et géopolitique.
Ne pas créer d’affolement
L’enjeu actuel, en France, comme dans les autres pays européens ou d’Amérique du Nord, est que toutes les mesures préventives – ou répressives – soient prises, sans que cela ne se voit trop, pour ne pas créer un climat d’affolement, voire de panique, dans les populations. D’où les prises de positions, de «force tranquille», qui ont émané des Ministres français, des Affaires étrangères et de l’Intérieur, après que les menaces aient été proférées, et après la prise d’un otage français en Algérie.
JPM
(septembre 2014)
► La déclaration du Ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius : « ne pas céder »
► La déclaration du Ministre français de l’Intérieur : « la France n’a pas peur »
Un vigipirate remaniéEn début d’année, Vigipirate a fait peau neuve. Alors qu’il s’appuyait sur un code couleur (jaune, orange, rouge ou écarlate), le plan de lutte antiterroriste ne comporte plus que deux niveaux. Celui dit de «vigilance» est activé en ce moment. Il implique une «posture permanente de sécurité», à travers la surveillance des gares, des aéroports, des lieux publics fréquentés ou des édifices symboliques. Le second niveau, «alerte attentat» ne sera enclenché qu’en cas d’attaque ou de danger imminent, engendrant notamment davantage de patrouilles ou l’interdiction de grands rassemblements. In Direct Matin du 24.09.2014 |