Dés le début de la crise sanitaire du Coronavirus, La Revue Civique avait souligné les aspects positifs provoqués par le confinement. L’usage des outils numériques, pour l’école et pour les entreprises, a été un recours qui a favorisé, dans les secteurs qui le permettaient (près de 40% du salariat), un maintien d’activités, ce qui a constitué une aubaine positive. Actu-Environnement, comme l’hebdo Le Point ou le think tank Terra Nova, se sont penchés sur ce phénomène qui peut contribuer à transformer la vie quotidienne de millions de citoyen(ne)s.
Cette révolution accélérée du télétravail est « un passage forcé pour certains, une réelle opportunité et une découverte pour d’autres », observe Remi Pin dans #ActuEnvironnement. Imposé aux chefs d’entreprises, ces pratiques se sont imposées alors « qu’ils (les) pensaient impossibles il y a encore quelques semaines ».
Ce journaliste indique que la France était très en retard dans la pratique du travail à domicile par rapport aux pays scandinaves et anglo-saxons. Avant le confinement, seuls 7 % des salariés français pratiquaient le télétravail selon une enquête du Forum Vies Mobiles. Pendant le confinement, environ 33 % des personnes en activité auraient pratiqué le télétravail.
53 % des gens l’ont vécu positivement. Et 73% des télétravailleurs sondés souhaitent continuer la pratique du travail à domicile, régulièrement ou ponctuellement. »
Remi Pin, Actu-Environnement.
L’expérience ne s’est pas toujours réalisée dans les meilleures conditions, précise Actu-Environnement, avec un espace de travail à aménager en quelques jours, une famille présente au domicile, et parfois un suivi scolaire à assurer. Néanmoins, 53 % des gens l’ont vécu positivement, que ce soit du fait de la réduction des déplacements domicile-travail, ou d’une meilleure organisation de son rythme de vie. Un sondage de CSA pour Malakoff Humanis confirme cet intérêt des Français : 73 % des télétravailleurs interrogés souhaitent continuer leur pratique à domicile de manière régulière (pour 32 %) ou ponctuelle (41 %). Ils sont 35 % à penser que cette période va modifier la position de leur entreprise à l’égard de cette pratique.
« Cette expérience peut constituer un levier de changement structurel, avec un rééquilibrage des pratiques, estime Sylvie Landriève, co-directrice du Forum Vies Mobiles. Le confinement a prouvé qu’une partie du travail pouvait se faire à distance, et il sera désormais plus compliqué aux managers de refuser du télétravail. » D’ailleurs plusieurs groupes veulent accélérer sur le sujet, et le recours au télétravail se renforce, observe encore Actu-Environnement. Le groupe automobile PSA a ainsi annoncé, dans un communiqué, vouloir faire du télétravail « la nouvelle référence pour les activités qui ne sont pas directement liées à la production ». La présence sur site ne sera plus que d’une journée à une journée et demi par semaine en moyenne, pour 80 000 salariés dans le tertiaire, le commercial, et la recherche-développement. Certaines entreprises ont revu à la baisse la surface de bureaux qu’elles doivent louer chaque année: une économie financière substantielle qui pourra améliorer la productivité et la rentabilité, en cette période dure de crise économique.
Des gains environnementaux majeurs, concernant notamment l’émission de particules fines
Cette révolution du télétravail provoquera-t-elle une mutation démographique et des déménagements en nombre, allant des grandes centre urbains vers les villes moyennes ou la campagne ? Il est bien sûr trop tôt pour l’assurer mais un constat est particulièrement marqué en Île-de-France, région la plus peuplée et concentrée de France où, indique Actu-Environnement, 45 % de ses habitants souhaiteraient quitter la région, selon une enquête publiée en 2018 par le même Forum Vies Mobiles. Motivations invoquées : les rythmes de vie trop stressant, la pollution, le coût de l’immobilier, le temps passé dans les transports ou le trafic automobile.
D’après l’Ademe, l’agence de la transition écologique, 74 % des salariés français se rendent en voiture au travail, 11 % en transport en commun. En Île-de-France, 41 % des salariés utilisent leur voiture pour aller au bureau, malgré une offre de transport en commun pléthorique mais très saturée. Alors que le trafic routier est le premier contributeur de l’émission de gaz à effet de serre en France (30 % des émissions), le télétravail concourt-il à limiter ces émissions ?, interroge Remi Pin dans Actu-Environnement.
L’Ademe avait tenté de répondre à la question en 2015. Une étude menée par l’agence avançait que le télétravail permet « de réduire d’environ 30 % les impacts environnementaux associés aux trajets domicile-bureau ». Un gain qui atteint jusqu’à 58 % pour les émissions de particules fines. « Sur 2,9 jours télétravaillés par semaine, cela représente une économie potentielle de 787 kg de CO2 par individu et par an (contre environ 12,2 t de CO2 au total par individu et par an) », précisait l’étude. En extrapolant à l’échelle d’une entreprise de 1 000 salariés, télétravailler un jour par semaine permettrait d’éviter l’équivalent des émissions annuelles de gaz à effet de serre d’environ 37 Français.
« Le télétravail libère du temps pour d’autres déplacements non liés au travail et rend acceptable des trajets domicile-travail plus importants car moins fréquents, précise Sylvie Landriève. Pour comprendre le rôle du télétravail dans la transition écologique, il convient de mener une réflexion sur la manière dont le temps libéré est utilisé, et sur les cadres de vie auxquels sa pratique donne accès ».
L’Ademe sortira cet été une étude sur les effets du télétravail sur les modes de vie et les déplacements associés, indique Actu-Environnement. « Les travaux en cours montrent de nouvelles externalités positives, explique Jérémie Almosni de l’Ademe. Le télétravail peut redéfinir des réseaux de proximité, et offre aux territoires la possibilité de se revitaliser ». Les ventes en circuit-court ou les centres désertés des petites villes pourraient donc bénéficier d’un essor du télétravail.
C’est donc, à l’évidence, une révolution plus large du mode de vie qui, du transport au logement et au lieu d’habitation, est induit à terme si le télétravail continue à avoir les faveurs, convergentes, des salariés et des des chefs d’entreprise.
(28/05/20)